One Health : une seule santé pour les êtres vivants et les écosystèmes
Le concept One Health vise à promouvoir une approche pluridisciplinaire et globale des enjeux sanitaires. D’où vient cette approche et en quoi consiste-elle ? Comment l’Anses l’applique-t-elle dans ses activités ?
Que signifie l'approche « One Health » et quels sont ses enjeux ?
L’approche « One Health » ou « une seule santé » en français, tient compte des liens complexes entre la santé animale, la santé humaine et l’environnement dans une approche globale des enjeux sanitaires. Suite à la pandémie Covid-19, et plus récemment des différentes crises Mpox, les réflexions pour une meilleure prévention et anticipation des nouvelles crises sanitaires infectieuses ont montré qu’il fallait aussi s’intéresser à leurs facteurs environnementaux.
Le groupe de haut niveau « Une seule santé », qui réunit des experts de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et de l'Organisation mondiale de la santé animale (OMSA) donne cette définition du concept One Health : « One Health est une approche intégrée et fédératrice qui vise à équilibrer et optimiser durablement la santé des personnes, des animaux et des écosystèmes. Elle reconnaît que la santé des humains, des animaux domestiques et sauvages, des plantes et de l’environnement au sens large est étroitement liée et interdépendante. L’approche mobilise de multiples secteurs, disciplines et communautés à différents niveaux de la société pour travailler ensemble afin d’améliorer le bien-être et de lutter contre les menaces pour la santé et les écosystèmes, tout en répondant au besoin collectif d’eau, d’énergie et d’air propres, d’aliments sains et nutritifs, en prenant des mesures contre le changement climatique et en contribuant au développement durable ».
De quand date l'approche One Health ?
Même si le principe existe depuis plus longtemps, le concept One Health est mis en avant depuis le début des années 2000. Il s’est développé avec la prise de conscience des liens étroits entre la santé humaine, celle des animaux et l’état écologique global ainsi que la nécessité de décloisonner les approches sanitaires.
Il a notamment fait l’objet d’un accord tripartite signé en 2010 entre l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’organisation mondiale de la santé animale (OMSA) et l’Organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO), puis d’un mémorandum d’entente quadripartite en 2022 entre l’OMS, l’OMSA, la FAO et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE).
Quelles sont les grandes thématiques de l’Anses concernant le One Health ?
Les missions de l’Anses englobent les santés animale, végétale, la sécurité sanitaire des aliments ainsi que les risques liés à l’environnement. Ses travaux s’inscrivent donc fondamentalement dans l'approche One Health. Pour favoriser le décloisonnement scientifique des approches sanitaires, les scientifiques qui travaillent au sein de l’Agence comme ceux sollicités dans ses comités d’experts ont des profils variés : vétérinaires, médecins, pharmaciens, ingénieurs et chercheurs en épidémiologie, en génétique, en écotoxicologue, en chimie, en physique, en hydrologie, en sciences humaines et sociales, etc.
De nombreuses thématiques couvertes par l’Agence font appel au One Health. Parmi elles on peut notamment citer :
- Les vecteurs : certains insectes et acariens transmettent des agents pathogènes à l’être humain, aux animaux ou aux végétaux. L’Agence s’intéresse notamment aux organismes nuisibles émergents. Le changement climatique favorise l’adaptation de certains vecteurs d’agents pathogènes à de nouvelles zones géographiques et est à l’origine de l’émergence de nouveaux agents pathogènes en Europe, affectant la santé des animaux ou des humains. L’Agence a ainsi mené une expertise sur le risque et les impacts des pathogènes transmis par le moustique tigre en France hexagonale et un autre sur les risques pour la santé humaine et animale liés aux tiques du genre Hyalomma en France
- Les zoonoses : 60% des maladies infectieuses sont communes à l’humain et l’animal et 75% des maladies infectieuses émergentes ont une origine animale. L’activité humaine joue un rôle majeur dans la propagation de ces maladies infectieuses animales ou humaines. L’accroissement de la population mondiale et celle des animaux domestiques, l’intensification des transports ont ainsi facilité la propagation de pathogènes. Dans le même temps, la dégradation de l’environnement, la déforestation et le développement des villes au niveau mondial ont favorisé le contact entre les animaux sauvages, les animaux d’élevage et l’être humain, ce qui a aidé la transmission de maladies.
- L’antibiorésistance : l’Agence suit et étudie les bactéries résistantes aux antibiotiques chez les animaux et dans l’alimentation. Elle surveille également l’usage des antibiotiques vétérinaires. Ces actions contribuent à la lutte globale contre l’antibiorésistance.
- La santé des végétaux : les parasites de plantes, les plantes compétitrices des cultures ou les plantes envahissantes ne mettent pas seulement en péril la santé des plantes infectées, les rendements des cultures et la biodiversité dans les milieux naturels. Ils peuvent également être dommageables sur la santé humaine, en provoquant des pathologies respiratoires, des allergies ou en ayant des propriétés urticantes ou toxiques.
- Le changement climatique : l’Anses étudie comment les nouvelles conditions environnementales dues au dérèglement climatique affectent la santé des animaux et des végétaux. Elle a également mené une expertise sur l’impact du réchauffement sur la santé des travailleurs et a réalisé des expertises sur les risques pour la santé et l’environnement de la réutilisation des eaux usées, en réponse à la raréfaction de la ressource en eau.
- L’exposome : l’exposome englobe tous les facteurs de risques non génétiques pour la santé, en étudiant l’ensemble des expositions que subit un être humain tout au long de sa vie. L’Anses a engagé un travail afin de mieux prendre en compte l’exposome dans ses activités et notamment pour l’évaluation des risques. Elle finance également des projets de recherche sur le sujet à travers le programme national de recherche Environnement – santé – travail.
- La santé des abeilles : de nombreux facteurs impactent la santé des abeilles, comme les agents pathogènes, les prédateurs, la biodiversité, les modifications environnementales, les conditions nutritionnelles ou l’exposition aux produits phytopharmaceutiques.
- La mise en œuvre du One Health passe par l’exploitation de données massives : l’Anses a engagé plusieurs chantiers afin de pouvoir croiser les données recueillies en santé humaine et animale et sur l’environnement. Cela passe par le développement de systèmes informatiques capables de supporter de grandes quantités de données, un meilleur échange de données entre les organismes publics et le développement de méthodologies et d’indicateurs permettant de recouper ces données.
Quels sont les principaux projets et partenariats sur le One Health dans lesquels l’Anses est impliquée ?
L’Anses participe ou a participé à plusieurs programmes en lien avec le One Health, dans lesquels s’inscrivent de nombreux travaux de recherche de ses équipes :
- PARC (2022 – 2029) : le Partenariat européen pour l'évaluation des risques liés aux substances chimiques a pour ambition de concevoir une évaluation des risques des substances chimiques de nouvelle génération, intégrant à la fois la santé humaine et l'environnement, dans une approche One Health. Il est coordonné par l’Anses et rassemble 200 partenaires de 29 pays, ainsi que l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA), Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), et l’Agence européenne pour l’environnement (EEA),
- l’EJP One Health (2018-2023) : ce programme conjoint européen rassemble 44 partenaires de 22 pays européens et est coordonné par l’Anses. Il a pour objectif l’acquisition de connaissances nouvelles dans les domaines des zoonoses alimentaires, de l’antibiorésistance et des risques infectieux émergents. Il a permis de financer 31 projets scientifiques.
- le DIM One Health (2017 – 2021) et le DIM One Health 2.0 (2021-2030) : le DIM (Domaine d’intérêt majeur) est financé par la région Ile-de-France. Il a été initié et coordonné par l’Anses et rassemble de nombreuses équipes de recherche en santé animale et humaine de la région. L’agence est toujours fortement engagée dans le DIM One Health 2.0.
L’Agence entretien de nombreux partenariats nationaux et internationaux avec des institutions et organismes de recherche en santé animale, humaine et environnementale. Ses laboratoires nationaux de référence dédiés à la santé animale et à la sécurité sanitaire des aliments travaillent en étroite collaboration avec les centres nationaux de référence œuvrant en santé humaine. L’Agence a également des mandats de référence de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), de l’Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et de l’Organisation mondiale de la santé animale (OMSA).
Une association européenne pour promouvoir le One Health
Suite à la fin du projet EJP One Health, les organismes partenaires du programme ont créé l’Association européenne Une seule santé (European One Health Association – EOHA). Celle-ci réunit 33 organismes dans 18 pays. Son siège se trouve à l’Anses, qui est membre fondateur. L’EOHA a pour objectif de devenir un acteur important de la promotion du concept « une seule santé » en Europe, notamment en renforçant la valence environnementale de cette approche.
L’association d’assurer la dissémination et l’utilisation des résultats de l’EJP One Health auprès des parties prenantes. D’autre part, cette association contribue à encourager l’opérationnalisation de l’approche One Health en Europe, en étroite collaboration avec les cinq agences européennes concernées (l’ECDC, l’EFSA, l’EEA, l’EMA et l’ECHA), et celles internationales (OMS, FAO, OMSA, PNUE). L’association contribue également aux actions Une seule santé en cours en Europe, notamment à certains partenariats soutenus par le programme pour la recherche et l'innovation Horizon Europe.
En 2025, l’EOHA mettra en œuvre l’initiative One Health Strengthening Europe (OHSE), financée par le ministère néerlandais de la santé et coordonnée par l’Institut néerlandais de santé publique (RIVM). Cette initiative vise à organiser des ateliers dans l’Union européenne mais aussi dans les pays périphériques européens, sur différents thèmes en rapport avec l’approche Une seule santé. L’Anses sera un des organisateurs de ces ateliers scientifiques.
L’Anses siège au comité de l’institut One Health, porté par l’Université Lyon 1 et adossé à l’École universitaire de recherche EID@Lyon. Cet institut lancé le 1er octobre 2024 a pour objectif sensibiliser et de former les décideurs publics et privés à l’approche « Une seule santé », notamment sur les maladies infectieuses émergentes.
L’Agence est impliquée dans les groupes de travail du groupe santé-environnement. Cette instance consultative nationale a pour vocation de coordonner les actions au niveau national et local en lien avec la santé et l’environnement dans une approche One Health. Elle réunit des représentants de l’État, des parlementaires, des collectivités territoriales, des associations et des entreprises.
L’Anses est membre de l’initiative internationale Prézode, qui a débuté en 2021. Celle-ci a pour objectif de comprendre les risques d'émergence de maladies infectieuses zoonotiques, et de développer et mettre en œuvre des méthodes innovantes pour améliorer la prévention et la détection précoce de ces émergences.