Dioxyde de titane sous forme nanoparticulaire : l’Anses définit une Valeur Toxicologique de Référence (VTR) pour l’exposition chronique par inhalation
Le dioxyde de titane sous forme nanoparticulaire est utilisé dans de nombreuses applications industrielles et commerciales. Dans le cadre de sa mission nationale d’élaboration de valeurs sanitaires de référence, l’Anses a été chargée de définir une Valeur Toxicologique de Référence (VTR) pour le dioxyde de titane sous forme nanoparticulaire (TiO2 -NP). Suite à une analyse approfondie de l’ensemble des données de toxicité disponibles, l’Agence recommande une VTR chronique par inhalation pour la forme P25 du TiO2-NP de 0,12 µg.m-3. A partir de cette valeur de référence, des évaluations de risques sanitaires seront menées dans le cadre des actions de gestion des installations et sites industriels en France. Il s’agit par ailleurs, de la première VTR élaborée pour un nanomatériau en France.
Le TiO2 peut se présenter sous des formes très diverses selon ses caractéristiques physico-chimiques et notamment des formes nanoparticulaires de taille inférieure à 100 nm. Il est utilisé, selon ses formes, pour ses propriétés d’absorption des rayons ultraviolets et son caractère colorant blanc dans de nombreuses applications industrielles et commerciales : en tant qu’additif alimentaire, dans des produits cosmétiques, des pigments et des peintures, notamment. En France, les quantités de substances à l'état nanoparticulaire produites, importées ou distribuées au-delà d’une quantité minimale de 100 g, doivent être obligatoirement déclarées dans la base en ligne R-Nano gérée par l’Anses. Les données recensées dans R-Nano indiquent que de nombreux sites industriels en France utilisent le TiO2-NP, ce qui constitue une source d’exposition pour les professionnels et potentiellement pour les populations riveraines.
Afin de répondre aux enjeux de gestion des installations et sites industriels en France, l’Anses a été chargée de définir une VTR chronique par inhalation pour le TiO2-NP (exposition par voie respiratoire). Une VTR est un indice toxicologique qui sert de repère pour l’évaluation des risques pour la santé humaine. En dessous de cette valeur, il est considéré que l’exposition à la substance ne présente pas de risque sanitaire.
Profil toxicologique du TiO2-NP et effet critique
Suite à une revue exhaustive de la littérature scientifique et à partir de l’ensemble des données relatives à la toxicité du TiO2-NP, les experts ont établi le profil toxicologique du TiO2-NP et déterminé son effet critique pour une exposition par inhalation.
L’analyse des données montre que le TiO2-NP provoque, suite à une exposition par inhalation, un phénomène inflammatoire pouvant s’accompagner d’une augmentation du nombre et/ou du volume des cellules pulmonaires. D’autres données expérimentales ont également permis de montrer que le TiO2-NP induit des effets sur le développement du fœtus et sur d’autres organes, notamment au niveau du système cardiovasculaire, du cerveau, du foie et des reins. La VTR du TiO2-NP est basée sur l’effet pulmonaire, correspondant à l’effet survenant aux expositions les plus faibles.
Une VTR chronique par inhalation
L’Anses propose une VTR chronique de 0,12 µg.m-3 pour le TiO2-NP sous forme P25 (anatase/rutile 80/20; 21 nm), forme la mieux documentée dans la littérature à ce jour. Par ailleurs, au regard des données très parcellaires sur le TiO2-NP, il n’a pas été possible de conclure sur de potentielles différences de dangerosité entre les différentes formes de TiO2-NP existantes. Ainsi, en l’état actuel des connaissances, il ne peut être affirmé que le TiO2-P25 soit la forme la plus toxique de TiO2-NP par voie respiratoire. L’Anses étudiera la faisabilité d’étendre cette VTR à d’autres formes de TiO2-NP.
En outre, au regard des données collectées et analysées dans le cadre de ces travaux, l’Agence confirme la nécessité de classer le TiO2-NP en tant que cancérogène par inhalation. En effet, le TiO2-NP présente des propriétés intrinsèques spécifiques à certaines formes, telles que sa grande réactivité de surface, la production d’espèces réactives de l’oxygène fortement oxydante ou encore les réactions de photocatalyse. De fait, le TiO2 ne peut être considéré comme une poussière faiblement soluble et de faible toxicité (dite PSLT). Actuellement, le TiO2 fait l’objet d’une proposition de classification en tant que cancérogène de catégorie 2 par le comité d’évaluation des risques de l’Agence Européenne des produits chimiques (ECHA).
D’autre part, l’expertise révèle que la plupart des études expérimentales disponibles sur le TiO2-NP explore uniquement les effets pulmonaires. Aussi, l’Anses souligne la nécessité de conduire des études complémentaires pour évaluer l’influence des différents facteurs physico-chimiques sur la toxicité du TiO2-NP, en prenant en compte tous les paramètres physiologiques et non plus uniquement la toxicité pulmonaire.
A noter que cette expertise s’inscrit dans un contexte plus large de travaux de l’Agence sur le TiO2, tels que le processus en cours d’évaluation dans le cadre du règlement REACh et l’évaluation de la toxicité de l’additif E171 sous forme nanoparticulaire dans le cadre d’une exposition par voie orale (ingestion).